Aleria (Haute-Corse)

 

Sur la côte orientale de la Corse à l’embouchure du fleuve Tavignano et dans un environnement lagunaire, Aleria est connue comme étant l’une des villes phocéennes d’Occident, l’Alalia mentionnée par Hérodote (I, 165-166) dont la fondation est située vers -565, soit quelques décennies après celle de Massalia (Marseille). C’est cette même Alalia qui, vers -545, accueille tout ou partie des réfugiés fuyant la cité-mère, Phocée, face à la pression de l’empire perse. Le même Hérodote nous dit par ailleurs que durant cinq années, nouveaux venus et Grecs déjà établis sur place cohabitent, mais que la piraterie exercée par les Phocéens en Mer Tyrrhénienne eut tôt fait de susciter une réaction de la part de leurs voisins. Une grande bataille navale opposa alors les Grecs à une coalition étrusco-punique, bataille à l’issue de laquelle les Phocéens furent contraints de quitter la Corse. Une partie d’entre eux gagna peut-être Marseille, les autres se dirigèrent vers l’Italie méridionale, plus précisément en Campanie où ils fondèrent Hyélé (Velia).

À ce moment, Aléria bascule semble-t-il directement dans l’aire d’influence étrusque, et face à un texte controversé de Diodore de Sicile (V, 13, 3-4) qui relate l’existence de deux villes distinctes, l’une grecque, l’autre étrusque, c’est l’archéologie qui nous renseigne alors principalement sur le devenir du site, pour l’heure essentiellement au travers de la nécropole de Casabianda. Les fouilles qui y ont été menées ont en effet révélé près de 200 sépultures datées des Ve-IIIe s. av. n. ère, révélatrices de pratiques funéraires et de mobiliers qui témoignent notamment d’une présence tyrrhénienne à partir de la charnière des VIe-Ve s. av. n. ère.

La prise d’Aléria par les armées romaines de Scipion en -259, à l’occasion de la première guerre punique, révèle que la Corse était passée un temps dans l’orbite commerciale et politique de Carthage. Désormais connue sous le nom latinisé d’Aleria, la ville connaît une certaine importance sous l’Empire mais se voit confrontée à un déclin progressif, accéléré au Ve s. de n. ère par les invasions vandales puis, plus tard, par les raids sarrasins.

Reconnu au XIXe s. sur la colline de « Palazzi », au sud du hameau de Matra, le site a fait l’objet de premières interventions archéologiques au lendemain de la première guerre mondiale, mais les premières recherches d’ampleur n’ont débuté qu’au milieu des années 50, sous la direction de J.-P. Boucher et J. Jehasse. Ces travaux, rapidement placés sous la seule direction de J. Jehasse, se sont ensuite poursuivis sans interruption jusqu’en 1992.

Au cours de ces quelques décennies, les recherches se sont largement focalisées sur la nécropole préromaine. L’habitat a quant à lui fait l’objet de fouilles extensives qui ont principalement porté sur la période romaine, mettant notamment au jour une grande partie du forum, l’extension de la ville antique étant quant à elle estimée à une dizaine d’hectares. Les phase d’occupation préromaines demeurent en revanche largement méconnues. Pour ces périodes, les données les plus précises sont issues des fouilles menées au niveau de la fortification méridionale, où ont été partiellement révélés un rempart à agger d’époque tardo-archaïque ainsi qu’une portion de rempart et une tour en grand appareil d’époque hellénistique.

Aleria rempart

Les recherches sur Aleria ont été relancées à partir de 2018 avec le soutien de la DRAC Corse et le Collectivité de Corse, autour d’un projet Collectif de recherche du Ministère de la Culture (« Aleria et ses territoires. Approches croisées »). Tandis que se développent les opérations d’archéologie préventive dans le secteur d’Aleria, de nouvelles recherches programmées débutent en 2021, tant sur l’habitat (E. Gailledrat, ASM) que sur la nécropole (F. Sacchetti, CCJ).

Le programme qui débute en 2021 avec le soutien de la DRAC Corse et du Labex Archimede (programme « Alalia »), en collaboration avec l’Université Saint-Louis (Bruxelles) et le Centre Camille Jullian, vise à l’actualisation des données chrono-stratigraphiques de l’habitat et du système défensif par l’ouverture ou la reprise de sondages anciens.

Responsable de la fouille : Eric Gailledrat (ASM)

Equipe scientifique : Franck Allegrini-Simonetti, Jean-Michel Bontempi, Laetitia Cavassa, Philippe Ecard, Paul Fontaine, Armelle Gardeisen, Kewin Pêche-Quilichini, Gaël Piquès, Nuria Rovira, Federica Sacchetti, Séverine Sanz-Laliberté, Ariane Vacheret

Dates de la campagne de fouilles 2023 : du 3 juin au 1er juillet 2023

Renseignements et contact : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.