Orientations scientifiques


La réflexion menée à l’occasion de la rédaction de ce bilan et du projet de l’unité a permis d’identifier des axes stratégiques communs aux cinq équipes, reflets des travaux menés au sein de chacune d’entre elle, dans la perspective et selon les orientations qui leur sont propres, mais qui relèvent de champs de recherches identiques.


Ces six problématiques de recherche, communes aux 5 équipes qui structurent l’unité, constituent le projet scientifique de l’UMR5140-ASM pour la période 2021-2025. Elles sont complétées par un volet spécifique sur les outils numériques de la recherche qui correspondent à des programmes développés en commun au sein de l’Unité.

  • Transitions, Mutations et Résiliences des sociétés anciennes (AC1)
  • Archéologie du Rite (AC2)
  • Paysages lagunaires et littoraux, vallées fluviales (AC3)
  • Villes, campagnes, territoires (AC4)
  • Des ressources vivrières au grand commerce (AC5)
  • Langues, écritures, textes (AC6)

Programme Commun : Outils numériques de la recherche archéologique : méthodes, corpus, dictionnairesTous ces axes stratégiques communs seront traités de manière diachronique et à l’échelle de l’ensemble du bassin méditerranéen, grâce aux différentes équipes et membres du laboratoire. En effet, chacun de ces grands domaines de recherche sera exploré sur un arc chronologique allant de la Préhistoire au Moyen Âge.

 


Transitions, Mutations et Résiliences des sociétés anciennes


Le devenir des sociétés, leurs évolutions, seront au cœur de cet axe, qui s’attachera à cerner leurs dynamiques d’évolution internes, leur capacité à s’adapter, en particulier dans le cas de confrontation avec d’autres sociétés que ce soit dans le cadre de contacts commerciaux, politiques/diplomatiques, ou de migrations. Ces questions portent autant sur les changements socio-économiques, culturels, que sur l’agrobiodiversité. Les phénomènes d’acculturations dans toute leur complexité, à toutes les périodes, seront étudiés, comparés et discutés, afin de nourrir les réflexions des uns et des autres sur les phénomènes de mutations et de résiliences des sociétés anciennes : par exemple, au Néolithique, néolithisation et phénomène campaniforme ; à l’âge du Fer contacts entre les populations locales et les commerçants phéniciens, étrusques et grecs ; à l’époque hellénistique Egypte ptolémaïque ; à l’époque romaine romanisation de la Gaule, de l’Afrique, de l’Espagne ; au Moyen Âge conséquences matérielles de la présence des wisigoths et formes de résilience dans les royaumes romano-germaniques.


Archéologie du rite


L’expression « archéologie du rite », promue par John Scheid, ne réduit pas l’étude du fait religieux et du domaine du sacré aux données de l’archéologie mais souligne au contraire l’importance d’une approche globale utilisant tous les types de sources afin de permettre de retrouver les différentes strates de constitution des rites au cours de l’histoire et de replacer l’étude des pratiques religieuses et rituelles au sein des sociétés. Elle comprend à la fois les pratiques funéraires, rituelles et cultuelles. Cette thématique s’inscrit dans une longue tradition de l’unité autour des pratiques funéraires avec plusieurs publications marquantes pour le précédent contrat : l’effort de publication des données anciennes et récentes sera poursuivi dans les années à venir.

L’archéologie des pratiques rituelles est une nouvelle thématique développée depuis deux contrats pour certaines équipes (SPP), depuis le dernier contrat pour les unes (Tesam), ou depuis plus longtemps pour d’autres (ENiM). Que ce soit pour l’Egypte ancienne, pour la Préhistoire ou la Protohistoire, pour l’Antiquité, l’Antiquité tardive ou le Moyen Âge, il s’agit de mieux comprendre les lieux, les structures, les pratiques, les mobiliers, les offrandes, qui sont en jeux dans les pratiques liées au sacré, qu’elles soient funéraires, rituelles ou cultuelles.


Paysages lagunaires et littoraux, vallées fluviales


Les recherches sur l’occupation des rivages lagunaires, des vallées fluviales et des plaines alluviales, mettant en communication le littoral et l’arrière-pays, sont une des spécificités d’ASM, en lien avec son implantation géographique au cœur d’un vaste système lagunaire patrimoine et témoin d’un état disparu dans d’autres secteurs du golfe du Lion. L’évolution de ces paysages particulièrement mobiles et le lien avec les installations humaines est au cœur des travaux de plusieurs équipes : AMR bien entendu, mais aussi SPP, TeSAM et TP2C, sans négliger les travaux menés par l’équipe ENiM sur le delta égyptien et la structuration des territoires autour de la vallée du Nil. La confrontation des données issues des séquences sédimentaires et des analyses paléo- environnementales avec les rythmes de l’économie, des occupations humaines, issues de l’analyse des données archéologiques, peut prendre désormais une nouvelle dimension grâce aux échelles de résolution de plus en plus fines de chacun de ces types de données. Les recherches sur les structures portuaires en contexte
fluvio-lagunaires sont un des points forts des équipes AMR et TP2C, et sont amenées à se développer encore.


Villes, campagnes, territoires de l’Egypte à l’Espagne, du Néolithique au Moyen Âge


Le fait urbain est un fait social et historique total. Afin de l’appréhender dans toutes ses dimensions et de développer la compréhension de cet aspect fondamental du développement des sociétés anciennes, il faut désormais procéder à un élargissement du cadre d’analyse, intégrer la notion de discontinuité dans l’émergence de l’urbanisation, travailler sur l’apparition et la disparition du fait urbain, sur le rôle des processus d’acculturation dans ces dynamiques de l’occupation de l’espace. La complémentarité de la ville et de la campagne (notamment économique), la question des zones péri-urbaines, la caractérisation des populations dans ces différents espaces ; la structuration des territoires, comme celle des paysages agricoles, le rôle du politique (élites ou pouvoir centralisé, usage de l’écriture) dans ces dynamiques, constituent autant de pistes

 


Des productions vivrières aux réseaux d’échanges : aspects de l’économie ancienne


Que ce soit durant la Préhistoire, la Protohistoire ou l’Antiquité, les sociétés ont produit des ressources vivrières et les ont diffusées, sur de plus ou moins grandes distances. L’acquisition de ressources biologiques, puis leurs transformations, entraînent laugmentation des productions matérielles (pressoirs, amphores pour contenir le vin ou l’huile, chariots pour leur transport, greniers). L’étude de ces aspects économiques des sociétés anciennes constituent une branche de travail traditionnelle de l’UMR5140. Comprendre ces phénomènes nécessite d’étudier les structures de productions, les différents mobiliers produits, leurs spécificités et leurs adaptations, mais aussi l’organisation des territoires, les routes, les structures portuaires et leurs évolutions. Dans ce dernier domaine, trois importants dossiers sont explorés actuellement par les membres de l’Unité : le port de Lattes, de l’âge du Fer à l’époque romaine ; la vallée de l’Hérault, depuis l’arrière-pays jusqu’au grau d’Agde ; le complexe des ports de Narbonne, depuis la fondation de la ville jusqu’à l’Antiquité tardive. Les études paléo-environnementales, comme celle des paléotempêtes par exemple qui sont révélatrices de contraintes plus importantes pour la navigation sur de longues distances, pourraient apporter un éclairage supplémentaire à l’analyse des rythmes économiques perceptibles à travers l’évolution de la quantité et de la diversité des importations.


Langues, écritures, textes


L’étude de l’écriture, vecteur de pouvoir et de mémoire, est un enjeu majeur de la compréhension des sociétés anciennes. Trace matérielle de la langue ou le plus souvent des langues en usage et de leurs évolutions, elle constitue un élément essentiel pour l’appréhension de l’organisation des sociétés ou encore pour la
connaissance des phénomènes de contacts culturels. L’apparition décritures (en Egypte ancienne, depuis environ 3000 av. J.-C. ou encore en Europe durant l’Antiquité ou l’âge du Fer) comme leur disparition (durant l’Antiquité tardive par exemple) doivent être analysées.


Au-delà des supports traditionnellement étudiés comme la pierre, les papyrus en Egypte ancienne, ou les ostraca, la totalité des techniques graphiques et des formes de l’écriture peut être intégrée à la réflexion, que ce soit les graffites présents dans les habitats et les sanctuaires ou encore les timbres sur les céramiques. Toutes les dimensions de l’écriture, y compris l’utilisation des signes, participent à une meilleure compréhension des hommes (et plus rarement les femmes) du passé.


L’analyse des textes égyptiens, grecs, gallo-grecs, latins apporte non seulement des informations sur les sociétés anciennes mais aussi sur la façon dont elles se percevaient et se mettaient en scène.

Programme Commun : Outils numériques de la recherche archéologique : méthodes, corpus, dictionnaires.

L’établissement de corpus épigraphiques, littéraires, archéologiques, bioarchéologiques, géoarchéologiques constitue l’étape indispensable des recherches menées au sein d’ASM et permet d’aborder les questions des formes de la production, de leurs spécialisations, que ce soit durant le Néolithique, les âges des métaux ou l’Antiquité. La collecte et le traitement de ces données constituent une part importante de l’activité, qu’il s’agisse d’écofacts, d’artefacts ou de productions littéraires ; ou encore des données archéologiques elles- mêmes. Ces corpus sont désormais édités principalement sous forme numérique et leur exploitation intègrent progressivement tous les développements récents de l’informatique : fouille de texte, indexation, open access.
ASM est connu pour l’excellence des outils informatiques qu’elle développe : certains depuis de longues années, comme le logiciel d’enregistrement et d’exploitation des données de fouilles, Syslat (www.syslat.fr) ; d’autres développés au cours des cinq dernières années grâce à l’obtention du labex Archimede comme le Vega (http://vega>-vocabulaire-egyptien-ancien.fr), ou la base Karnak (http://sith.huma-num.fr/karnak). Le développement de dictionnaires et de corpus a été entrepris lors du précédent contrat et sera poursuivi, tandis que d’autres champs disciplinaires pourront être investis comme celui de l’épigraphie avec la mise en ligne des inscriptions latines de Narbonnaise. Par ailleurs, il est prévu de développer à l’échelle de l’unité la mise en ligne des données de la recherche, pour amplifier leur diffusion dans le cadre des sciences ouvertes, avec par exemple l’accès aux informations enregistrées avec Syslat pour les sites archéologiques déjà publiés.
Les humanités numériques seront au cœur de ce dernier axe stratégique mais elles seront aussi présentes dans tous les autres axes, tant le numérique a investi tous les domaines de recherche de l’archéologie, du terrain à la publication, de l’acquisition des données à leur traitement et leur exploitation.