Projet Collectif de Recherche « Les ports antiques de Narbonne »

Le projet collectif de recherche sur les ports antiques de Narbonne s’inscrit dans le cadre d’un partenariat entre la Région Languedoc-Roussillon, l’État et les collectivités. Il est financé par la Région Languedoc-Roussillon, le CNRS (ASM-UMR 5140), le MCC (SRA et DRASSM), l’UPV, les villes de Narbonne et Gruissan et le Labex Archimède.

L’organisation du port antique de Narbonne restait méconnue à cause d’un important recouvrement sédimentaire et d’une histoire complexe. Le PCR s’attache à combler ces lacunes en continuant l’exploration des sites de Gruissan, Port-la-Nautique et Mandirac et en développant les prospections géophysiques.

En ville, des entrepôts ont été récemment découverts quai d’Alsace lors d’opérations d’archéologie préventive et tendent à confirmer la présence d’un port urbain en rive gauche. Le système portuaire narbonnais s’organisait donc autour d’un port fluvial dans la cité et d’avant-ports dans les lagunes, notamment à l’embouchure du fleuve avec les sites de Port-la-Nautique et du Castélou-Mandirac. À l’entrée même des étangs, des grands établissements comme l’île Saint-Martin à Gruissan permettaient de faire étape, de décharger une partie de la cargaison sans avoir à remonter jusqu’à Narbonne ou de se fournir en eau douce grâce à des citernes aménagées au plus près du littoral. Le site de Port-la-Nautique, à quatre kilomètres au sud de la ville, était un important lieu portuaire dont témoignent les découvertes de grands entrepôts et, enfouis dans la vase, les artefacts perdus lors des transbordements. Des considérations économiques et environnementales ont pu jouer un rôle dans l’abandon de ce site au profit de Mandirac-Castélou à la fin du Ier s. de n. ère. Le maintien d’une embouchure du fleuve a nécessité de grands aménagements, notamment pour canaliser l’Aude à l’époque romaine dans le secteur de Mandirac-Castélou. Ce « port-canal » d’une cinquantaine de mètres de large a fait l'objet d'entretien et de réaménagements importants et continus durant plus de quatre siècles.

En 2015, trois opérations programmées ont été réalisées. À Gruissan, les fouilles de l’île Saint-Martin (responsable G. Duperron, Univ. Montpellier 3) ont concerné le complexe architectural avec le bâtiment en grand appareil, la cour et les pièces attenantes mais également un secteur spécifique où des citernes et une tour ont été mises au jour. Le site de Port-la-Nautique a fait l’objet de prospections et de sondages afin de compléter la topographie de cet ensemble portuaire (C. Sanchez et C. Carrato). Des aménagements en terrasse ont été mis en évidence au dessus du vivier. Ce dernier semble isolé, car les premières constructions luxueuses se trouvent à 300 m vers l’est. En revanche, une fosse comblée par des rejets issus de la démolition de la villa laisse entrevoir la décoration de cet habitat qui pourrait se développer vers l’est, perpendiculairement au rivage. Un bâtiment encore en partie en élévation est présent le long de la route et pourrait être en lien avec les entrepôts fouillés en 2010. La fouille de Mandirac à Narbonne (responsable M.-P. Jézégou, DRASSM) s’est concentrée sur la fin de l’étude de l’épave de l’antiquité tardive utilisée dans la reconstruction d’une digue. Un flanc du bateau a été démonté pour étude. L’embarcation, d’environ une douzaine de mètres de long, correspond à un bateau fluvial permettant le transfert des marchandises.

Si ces dernières années l’embouchure du fleuve a pu être mise en évidence sur deux kilomètres dans le secteur du Castélou et de Mandirac, le lien avec la ville, située à 6 km plus au nord, restait à définir. La campagne de mesures de tomographie de résistivité électrique réalisée par V. Mathé et G. Bruniaux de l’Université de la Rochelle a permis de combler cette lacune mais reste à préciser en couplant notamment avec des études géomorphologiques.

Les prospections géophysiques de juillet 2015 ont été réalisées, depuis le sud vers le nord, dans la zone du Castélou, de Mandirac, de Fringuet, de Craboulette et Craboules, de l’Étang du Cercle et de l’autoroute. La première phase de cette campagne a été de visualiser la terminaison des berges occidentale et orientale dans la partie sud du Castélou. Pour cela, des sections de résistivité électrique ont été réalisées dans cette zone. Elles permettent d’obtenir une image électrique du sous-sol et d’identifier des contrastes de résistivité associés à des structures archéologiques et géologiques. Ces sections sont complémentaires des prospections par piquetage effectuées dans les années précédentes pour identifier la fin de ces deux berges.

La seconde étape a été d’essayer d’approcher la géomorphologie des anciens cours de l’Aude dans la zone de Mandirac dont certains ont été repérés par les dernières campagnes de prospections électromagnétiques et magnétiques. Elles mettaient en évidence la présence d’un méandre se poursuivant vers le nord. Les sections de résistivité électrique viennent donc compléter et apporter des données supplémentaires pour l’étude paléoenvironnementale de ce fleuve, les positions d’anciens chenaux de l’Aude étant déjà repérées par les prospections de surface. La connaissance de ces positions permettra ainsi de connaître leurs signatures électriques sur les sections. Ceci permettra de calibrer les données de résistivité pour les associer à une formation sédimentaire.

La troisième phase a donc été de suivre l’un des paléo-chenaux de l’Aude plus vers le nord. L’objectif étant d’identifier de possibles structures en forme de chenal par la méthode de la tomographie de résistivité électrique. Des prospections électromagnétiques de surface sont utilisées pour identifier des structures pouvant être associées à des chenaux. Elles permettent de sélectionner l’emplacement le plus propice pour caractériser la morphologie et la stratigraphie des derniers cours par les sections de résistivité électrique.

Différents chenaux ont donc été repérés par la prospection électromagnétique et la tomographie de résistivité électrique depuis la zone de Mandirac vers la zone de l’autoroute, près de la ville de Narbonne.

Corinne Sanchez (CNRS-ASM), M.-P. Jézégou (DRASSM) et V. Mathé (Univ. De la Rochelle), pour l’équipe.

 

fig.1.CarteNarbonne 

Fig. 1 : À l’embouchure de l’Aude antique : les sites de Port-la-Nautique et du Castélou (Aerodata 2010 et J. Cavero, CNRS).

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