Le site de Gruissan, établissement littoral Saint Martin (Aude)

La fouille programmée de l’établissement de Saint-Martin-le-Bas à Gruissan s’inscrit dans le cadre du Programme Collectif de Recherche « Les ports antiques de Narbonne », coordonné par C. Sanchez (CNRS UMR5140) dans le cadre d’un protocole État/Région. Ce projet de recherche pluridisciplinaire vise à explorer un certain nombre d’établissements installés sur le littoral narbonnais, susceptibles d’appartenir à un vaste complexe portuaire appartenant à la colonie romaine de Narbo Martius, capitale de la province de Narbonnaise.

Voir le carnet de recherche sur les ports antiques de Narbonne : http://pan.hypotheses.org/les-sites/saint-martin-gruissan

 

L’île Saint-Martin à Gruissan représente un point remarquable au cœur des étangs narbonnais, situé à une douzaine de kilomètres au sud-est de Narbonne. L’établissement antique de Saint-Martin-le-Bas, qui s’étend sur au moins 3 ha, est adossé au versant sud de l’île, à environ 300 m du rivage actuel de l’étang de l’Ayrolle. Les fouilles conduites depuis 2011 ont permis de mettre au jour et d’étudier la partie centrale du site, sur plus de 2000 m².

L’établissement se présente comme un vaste complexe architectural, organisé autour d’une grande cour centrale de 380 m², équipée sur trois côtés de portiques d’une largeur de 4 m. A l’est, plusieurs petites pièces ouvertes sur la galerie pourraient correspondre à des espaces à vocation commerciale ou administrative. Il existait également dans cette zone une pièce de grandes dimensions (91 m²) comportant un niveau souterrain, qui évoque un espace de stockage, à l’image des cryptoportiques connus dans les grandes villes romaines, notamment à Narbonne et à Arles.

Gruissan

Toutefois, l’élément le plus remarquable est un bâtiment construit à l’aide de blocs monolithiques de calcaire de plus d’un mètre de long. Cet édifice rectangulaire, s’étendant sur 14 x 7,5 m, comportait une élévation importante qui lui donnait un aspect monumental. Il constituait sans doute également un bon point de repère pour les navires qui souhaitaient s’engager dans la lagune pour atteindre les ports de la ville. Plusieurs pièces occupaient le rez-de-chaussée du bâtiment, où se déroulaient des opérations commerciales, comme le montrent les objets découverts sur le sol : une balance, des jetons de comptabilité et du matériel d’écriture.

Deux installations thermales font également partie des équipements de ce complexe. Elles se caractérisent par des dimensions assez modestes et l’absence de décors luxueux. On peut penser que la vocation de ces thermes était avant tout utilitaire et répondait à la nécessité de se laver après avoir passé une période en mer. De plus, on peut signaler la présence d’une forge, qui constitue la seule activité artisanale attestée sur le site jusqu’à présent. Enfin, les citernes situées en contrebas de l’établissement, à proximité du rivage de l’étang, constituent un dernier élément remarquable. En effet, les dimensions de ces réservoirs sont tout à fait exceptionnelles : le mieux conservé mesure 7,20 m x 3,60 m !

Fig1 vue aerienneIl est possible aujourd’hui de proposer une première interprétation des vestiges mis au jour. Les éléments recueillis orientent la réflexion vers un établissement étroitement lié au complexe portuaire de Narbonne, dont on connait l’importance économique considérable durant toute l’Antiquité. La présence d’un édifice en grand appareil et son association avec une vaste cour à portiques sont autant d’éléments généralement attestés dans des espaces publics. La construction d’un complexe d’une telle ampleur, dans une zone isolée et éloignée de la cité, ne peut sans doute s’expliquer que par le rôle que celui-ci occupait au sein du système portuaire narbonnais. L’intensité des trafics commerciaux dans cette zone impliquait nécessairement l’existence de structures spécifiques. La disposition autour de la cour centrale de pièces de stockage souterraines et de boutiques ou de bureaux semble particulièrement favorable à la réalisation de transactions commerciales et au stockage des marchandises échangées. Ce complexe pouvait également abriter un certain nombre d’activités de services. Ainsi, la relative modestie des deux balnéaires mis au jour témoigne bien de leur caractère avant tout fonctionnel et pratique. La présence d’une forge permettait peut-être de réaliser des réparations navales. Enfin, les grandes citernes situées près du littoral devaient assurer l’approvisionnement en eau des bateaux tandis que la tour constituait un point de repère pour se diriger à l’entrée de la lagune.

 

Vue Generale 2016 D’autre part, il convient de souligner la position stratégique occupée par le site, à l’entrée de la lagune. De fait, durant l’Antiquité, il s’agit du premier établissement rencontré par les navires venant de la mer et se dirigeant vers les ports de Narbonne. On peut donc supposer qu’il avait une fonction de contrôle des trafics commerciaux et appartenait à l’infrastructure administrative et douanière de la cité, qui devait être importante puisque l’on sait que des taxes étaient prélevées sur toutes les marchandises transitant par le port.

On pourrait ainsi se trouver en présence d’un établissement public aux fonctions multiples, où se seraient déroulées toutes les activités nécessaires au bon fonctionnement de l’un des ports les plus importants de Méditerranée occidentale. Si la poursuite des recherches devait confirmer cette hypothèse, le site de Saint-Martin apparaitrait alors comme un élément-clé du système portuaire de Narbonne.

Les recherches en cours montrent que l’établissement est occupé durant toute l’époque romaine. Sa création semble intervenir peu après la fondation de la colonie de Narbonne, à la fin du IIe s. av. J.-C., mais cette première phase est encore peu connue. En revanche, la construction du complexe monumental est bien datée de l’époque d’Auguste, probablement vers 20/10 av. J.-C. L’ensemble de ces installations demeure en fonction durant toute l’époque impériale, jusqu’au milieu du Ve s. C’est à ce moment-là que l’on assiste au démantèlement progressif des bâtiments, afin de récupérer des matériaux de construction.

gruissan Fig3 Fouille en cours 2016 vignetteLe site, dont l’occupation se poursuivra jusqu’au VIIe s., change alors de vocation. Il semble accueillir désormais une population paysanne, exploitant les ressources naturelles locales. Les nombreuses meules à grain soulignent l’importance de la culture des céréales, tandis que l’élevage est bien attesté par différents objets (sonnaille, forces pour la tonte, etc.) mais surtout par des carcasses d’animaux. De plus, la proximité du littoral est mise à profit par les habitants du site, comme le montre l’omniprésence des coquillages dans les dépotoirs. La pêche est également pratiquée, comme en témoigne la découverte fréquente d’hameçons et de lests de filets, mais aussi celle d’arêtes de poissons et même de vertèbres de mammifères marins (os de seiche, de dauphin et même de baleine !). Enfin, l’établissement de Saint-Martin continue à prendre part au grand commerce méditerranéen. Les fouilles ont en effet montré que des produits de toute la Méditerranée arrivent sur le site à cette époque. L’Afrique du Nord, et en particulier la région de Carthage, fournit aux habitants de la vaisselle de table et des lampes à huile aux décors très soignés, qui témoignent de manière concrète de la christianisation de la société (chrismes et autres symboles chrétiens). Différents produits transportés en amphore, en particulier de l’huile d’olive, proviennent de la même région. De plus, des vins réputés sont importés de la Méditerranée orientale, notamment les productions des vignobles de Terre Sainte, particulièrement valorisés à cette époque, dont les amphores dites « de Gaza » conservent la trace.



Les fouilles se déroulent en avril et septembre, sous la direction de G. Duperron, assisté de F. Bigot, A. Doniga et M. Scrinzi.

Les horaires sont les suivants : du lundi au vendredi, 6h00-13h00/17h00-19h00 et le samedi de 6h00 à 13h00, samedi après-midi et dimanche : repos.

Modalités d’inscription :

L’âge minimum requis est de 18 ans, il est nécessaire de s’inscrire pour une durée obligatoire de 3 semaines en avril ou en septembre.

Le voyage est à la charge des participants.

Le logement en dur et les repas sont pris en charge par le chantier. Les participants devront prendre part aux tâches collectives liées aux repas et à l’entretien journalier des locaux. Ils devront se munir de draps/sac de couchage et oreiller. Il faut être en excellente condition physique, bien supporter la chaleur et le soleil. La vaccination contre le tétanos est obligatoire.

Accès :

  • En voiture, par l’A9, sortie Narbonne Sud, direction Gruissan centre ville. Adresse précisée dans le courrier de confirmation.

  • En train, par TGV ou TER, arrivée à Narbonne.

Contact : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Campagne d'avril : complet.

Campagne de septembre : s'inscrire à l'aide du formulaire électronique. Votre demande sera automatiquement transmise à Guillaume Duperron.